Egypte: 24 policiers tués dans le Sinaï

AFP

Le Caire - La police a été frappée lundi par l'attaque la plus meurtrière depuis des années en Egypte avec au moins 24 morts dans le Sinaï, en pleine crise entre l'armée et les partisans du président islamiste Mohamed Morsi qu'elle a destitué.

Egypte: 24 policiers tués dans le Sinaï

L'Alliance anti-coup d'Etat, la coalition pro-Morsi, a appelé à de nouvelles manifestations au Caire après la prière de l'après-midi vers 14H00 GMT. Dimanche, elle avait annulé des cortèges qui devaient partir des mêmes mosquées, invoquant des raisons de sécurité.

Des assaillants soupçonnés d'appartenir à la mouvance radicale islamiste ont attaqué à la roquette deux minibus de la police dans le nord de cette péninsule instable, où les attaques meurtrières contre les forces de l'ordre se sont multipliées depuis la destitution de M. Morsi le 3 juillet, selon des sources médicale et de sécurité.

Le ministère de l'Intérieur a accusé des "terroristes" d'avoir commis cette attaque après laquelle les autorités égyptiennes ont fermé le point de passage de Rafah avec la bande de Gaza contrôlée par les islamistes du mouvement palestinien Hamas.

Après les violences qui ont fait plus de 800 morts depuis mercredi à travers le pays, la police et l'armée décimant chaque jour un peu plus les rangs des manifestants pro-Morsi, le général Abdel Fattah al-Sissi, chef de la toute-puissante armée et nouvel homme fort du pays, a juré dimanche soir que l'Egypte ne "cèderait" pas face à la "violence" des islamistes.

S'exprimant devant des centaines d'officiers, il a promis aux islamistes qui auront choisi la violence une riposte "des plus énergiques", faisant apparemment fi du tollé déclenché dans de nombreux pays dont certains ont parlé de "massacres".

Dans ce contexte, les représentants des 28 Etats membres de l'Union européenne devaient se réunir à Bruxelles pour examiner la profonde crise en Egypte.

 

Embouteillages et armée au Caire

Dimanche, les dirigeants de l'UE, Herman Van Rompuy et Jose Manuel Barroso, ont prévenu que l'Union était prête à "réexaminer" ses relations avec ce pays s'il n'était pas mis fin aux violences, assurant que le retour au calme était de la responsabilité de l'armée et du gouvernement intérimaire qu'elle a installé.

Même si l'état d'urgence et le couvre-feu nocturne restaient en vigueur, le trafic a repris le matin au Caire, qui a retrouvé ses habituels embouteillages. Les habitants reprenaient le chemin du travail, tandis que des magasins étaient ouverts.

Des axes de la capitale restaient contrôlés par des chars de l'armée, et le gouvernement a annoncé que les mosquées seraient désormais fermées en dehors des heures de prières, pour tenter d'éviter les rassemblements pro-Morsi.

Une grande partie des Egyptiens, chauffée à blanc par une presse unanime pour dénoncer le "terrorisme des Frères", approuvent la répression et ne manifestent aucune sympathie pour les Frères musulmans malgré la violence dont ils sont victimes.

La télévision publique affiche en permanence le logo "l'Egypte combat le terrorisme", en anglais, et diffuse des clips à la gloire de l'armée et de la police.

Face aux craintes de la montée du phénomène de justice de rue et dans un apparent geste d’apaisement, le gouvernement a interdit les "comités populaires", ces milices de résidents armés laissés libres pendant des jours au Caire de s'en prendre aux islamistes présumés et aux journalistes étrangers accusés de défendre les pro-Morsi.

"Assassinat de sang-froid"

L'attentat de lundi au Sinaï porte à 73 le nombre de membres des forces de l'ordre tués dans cette région depuis la destitution de M. Morsi, selon un décompte de l'AFP.

Des groupes islamistes radicaux ont établi leur base arrière dans cette péninsule désertique majoritairement peuplée de bédouins aux relations difficiles avec le pouvoir central et théâtre de multiples trafics le long de la frontière israélienne.

Les tensions se sont accrues depuis la chute de Hosni Moubarak début 2011, et ont encore empiré depuis le 3 juillet.

Dimanche, la police a affirmé que 36 détenus, tous des Frères musulmans, avaient été asphyxiés par du gaz lacrymogène pendant une tentative d'évasion. Ces détenus, soupçonnés d'avoir enlevé un officier de police, se trouvaient dans un convoi transportant plus de 600 prisonniers islamistes.

Dans un communiqué en anglais, les Frères musulmans ont estimé que ce drame confirmait "la violence intentionnelle visant les opposants au coup d'Etat et l'assassinat de sang-froid dont ils sont les cibles".

Depuis que l'armée a destitué et arrêté M. Morsi, l'Egypte est divisée en deux camps qui semblent désormais irréconciliables : d'une part les Frères musulmans, et de l'autre les partisans de la solution sécuritaire de l'armée, qui l'a emporté sur les rares voix prônant le dialogue au sein des nouvelles autorités.

Premier président démocratiquement élu du pays, M. Morsi était accusé par ses détracteurs et des millions de manifestants d'avoir accaparé le pouvoir au profit des islamistes et d'avoir achevé de ruiner une économie déjà exsangue.



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