Egypte: manifestations rivales, Ban appelle à libérer Morsi
AFP
Le Caire - L'Egypte devait être vendredi le théâtre de manifestations rivales entre partisans et opposants de Mohamed Morsi, tandis que le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon appelle l'armée égyptienne à libérer le président islamiste.
Les autorités ont renforcé la sécurité au Caire et à travers le reste du pays pour cette journée à hauts risques, alors que les violences liées aux troubles politiques ont déjà fait plus de 200 morts depuis un mois.
Les islamistes doivent commencer à manifester en début d'après-midi, après la traditionnelle prière musulmane du vendredi.
Au Caire, des cortèges doivent partir d'une trentaine de mosquées pour se rendre sur deux sites où les partisans du président renversé Morsi ont établi des campements, près de l'Université du Caire et devant la mosquée Rabaa al-Adawiya, dans le nord-est de la capitale.
Les Frères musulmans, dont est issu M. Morsi, dénoncent sans relâche le "coup d'Etat" par lequel l'armée a déposé le 3 juillet le premier président démocratiquement élu d'Egypte, après des manifestations massives d'une partie de la population fin juin pour réclamer son départ.
"Je suis ici pour soutenir le vrai président d'Egypte. Nous n'acceptons personne d'autre que M. Morsi, et nous allons manifester pacifiquement", affirmait El-Baz Abou Maati, un habitant de Mansoura, dans le delta du Nil (nord), venu au Caire pour participer aux rassemblements.
Le camp adverse doit se retrouver plus tard dans l'après-midi sur la place Tahrir, site traditionnel des grandes manifestations au Caire, et devant le palais présidentiel, dans le quartier d'Héliopolis (est).
"+Feuille de route+ irréversible"
Le chef de l', le général Abdel Fattah al-Sissi, artisan du renversement de M. Morsi et nouvel homme fort du pays, a appelé mercredi les Egyptiens à descendre en masse dans la rue pour lui donner un "mandat" afin d'en "finir avec le terrorisme et la violence".
Les médias gouvernementaux et privés, massivement hostiles à M. Morsi, ont multiplié les appels à se joindre aux manifestations réclamées par l'armée. "Sissi attend la parole du peuple" titrait le journal gouvernemental Al-Akhbar.
L'armée a depuis jeudi fait alterner déclarations apaisantes et plus menaçantes.
Elle a ainsi assuré que les propos du général Sissi ne visaient pas les Frères musulmans en particulier, mais a dans le même temps, dans une déclaration officieuse relayée sur internet, donné 48 heures pour renoncer à toute violence et accepter le processus de transition politique.
Après les rassemblements de vendredi, les forces armées ont laissé entendre qu'elles pourraient "changer de stratégie face à violence et au terrorisme".
Le guide suprême de la confrérie islamiste, Mohamed Badie, a quant à lui appelé à des manifestations "pacifiques", tout en exhortant ses partisans à ne pas baisser la garde face au "coup d'Etat sanglant".
A l'étranger, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a appelé "toutes les parties à faire preuve d'un maximum de retenue", et Washington a exprimé son "inquiétude" après les déclarations du général Sissi.
"Retour au régime Moubarak"
Pour Amnesty International, "l'appel du général Sissi fait redouter que les forces de sécurité ne se préparent à utiliser la force pour mettre fin aux manifestations des pro-Morsi".
M. Ban a également appelé l'armée à libérer M. Morsi et d'autres dirigeants des Frères musulmans, ou "que leurs dossiers soient examinés de façon transparente sans plus attendre".
Mohamed Morsi est détenu par l'armée avec certains de ses collaborateurs dans un lieu tenu secret depuis sa destitution le 3 juillet.
Mais alors qu'il était jusqu'à présent retenu sans charges, un tribunal a ordonné sa mise en détention préventive. La justice invoque des accusations sur des liens présumés avec le Hamas palestinien, qui l'aurait aidé à s'évader de prison début 2011 au cours de la révolte qui fit tomber l'ex-président Hosni Moubarak. M. Morsi avait été emprisonné par le régime Moubarak.
Les Frères musulmans ont vu dans cette décision, un "retour en force du régime Moubarak".
Arguant que M. Morsi ne pouvait régler la grave crise politique secouant le pays, l'armée l'a déposé le 3 juillet et a nommé un président civil intérimaire pour gérer la transition avant la tenue à une date indéterminée d'élections générales.
Elu en juin 2012, le premier président islamiste et civil d'Egypte était contesté par une partie de la population et l'opposition qui l'accusaient d'accaparer le pouvoir au profit des Frères musulmans.
violences, déclenchées fin juin, ont fait plus de 200 morts, dont une quarantaine dans des attaques dans le Sinaï, selon un décompte de l'AFP à partir de sources médicales et de sécurité.