Espagne: le pédophile grâcié par erreur au Maroc devant la justice

AFP

Madrid - Un pédophile espagnol grâcié par erreur au Maroc, puis arrêté en Espagne, est arrivé mardi au tribunal de l'Audience nationale à Madrid, où un juge doit décider de le mettre ou non en prison en attendant son éventuelle extradition.

Espagne: le pédophile grâcié par erreur au Maroc devant la justice

Daniel Galvan, un homme de 63 ans au passé trouble, condamné en 2011 au Maroc à 30 ans de prison pour des viols sur onze mineurs, a été arrêté lundi dans un hôtel de Murcie, dans le sud-est de l'Espagne, en vertu d'un mandat d'arrêt international lancé le même jour par le Maroc.

Ce pays réclame l'extradition de Daniel Galvan, après l'avoir grâcié le 30 juillet par erreur alors que Madrid avait en fait demandé qu'il soit transféré vers une prison espagnole.

Cette mesure annoncée par le roi Mohammed VI a soulevé une vague de colère populaire au Maroc, qui a conduit le souverain à annuler dimanche cette grâce.

Le nom de Daniel Galvan figurait sur une liste de 48 prisonniers espagnols grâciés après une visite en juillet du roi d'Espagne Juan Carlos, un interlocuteur privilégié de Mohammed VI.

Mardi, le juge Fernando Andreu va devoir décider si Daniel Galvan "est mis en prison ou laissé en liberté, sans restriction ou avec des mesures de contrôle judiciaire, le temps qu'une décision soit prise sur son extradition", a indiqué une source judiciaire.

Un cas de figure "assez étrange" a reconnu cette source, qui pourrait même tourner au casse-tête pour la justice espagnole.

En effet la convention d'extradition entre l'Espagne et le Maroc prévoit que chacun de ces pays ne peut extrader ses ressortissants vers l'autre.

L'annulation d'une grâce est de surcroît une situation atypique en Espagne, puisque dans ce pays le gouvernement ne peut décider d'une telle mesure.

C'est sur ces différentes questions que devra se pencher dans les semaines qui viennent l'Audience nationale, avant qu'un collège de trois juges ne rende sa décision sur la demande marocaine.

Embarrassante pour la justice espagnole, l'affaire Galvan a aussi créé des remous au Maroc où le roi Mohammed VI a répondu lundi au scandale en révoquant le directeur de l'administration pénitentiaire, cette administration étant accusée d'avoir "transmis par inadvertance des informations erronées de la situation pénale de l'intéressé".

A mesure que montait le scandale, des informations ont filtré dans la presse, dépeignant un homme au passé trouble, parlant arabe, identifié par certains comme un espion d'origine irakienne alors que lui-même se présentait comme un professeur d'université à la retraite.

Selon El Pais, Galvan avait raconté à son avocat marocain être un ancien responsable de l'armée irakienne et avait collaboré avec les services secrets étrangers pour renverser l'ancien dictateur Saddam Hussein, chassé lors de l'intervention militaire menée par les Etats-Unis en 2003.

Pour ce journal, le nom de Daniel Galvan peut être "l'identité que lui ont fabriquée les services secrets quand ils l'ont fait sortir d'Irak, lui ont fourni des papiers espagnols et l'ont transformé en un professeur de l'université de Murcie à la retraite".

Le pédophile avait en effet travaillé dans cette université, comme stagiaire entre 1996 et 1998 au département de Relations internationales, puis sous contrat entre 1998 et 2002.

Selon El Mundo, Galvan, d'origine irakienne, s'était installé en 2005 à Kenitra, au Maroc, racontant qu'il était un professeur d'université à la retraite.

Selon le journal, le tribunal qui l'a condamné a établi qu'il avait "profité des problèmes d'argent des familles du voisinage" pour commettre des abus sur les enfants.

L'affaire a aussi suscité l'embarras en Espagne, où la Maison royale a expliqué n'avoir participé à l'élaboration d'aucune liste de prisonniers.

Lors de sa dernière visite au Maroc, a expliqué un porte-parole, le roi Juan Carlos s'était seulement "intéressé à la situation des prisonniers espagnols" dans ce pays.

Une source proche du dossier à Madrid a indiqué de son côté que le gouvernement espagnol avait soumis au Maroc les noms de 48 prisonniers, 18 dont il demandait la grâce et 30, dont Galvan, dont il demandait le transfert dans des prisons d'Espagne.



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