Invictus Games, la fierté retrouvée des soldats afghans invalides de guerre

AFP

Kaboul, 18 oct 2018 (AFP) - Amputé d'une jambe il y a six ans lors de combats en province de Kapisa, Aminullah avait "perdu tout espoir". Mais depuis qu'il a intégré l'équipe de l'armée afghane pour les Invictus Games il se dit heureux de pouvoir enfin "prouver à nouveau (s)a valeur".

Créés sur le modèle des jeux paralympiques, les Invictus Games sont une compétition sportive ouverte aux blessés et invalides de guerre dont la première édition s'est déroulée en septembre 2014 à Londres.

Quelque 500 sportifs issus de 18 pays sont attendus à partir de samedi à Sydney pour l'édition 2018.

Aux côtés des sept autres membres de l'équipe afghane, Aminullah Arsalan répète à l'envi la "fierté" qui sera la sienne de porter haut les couleurs du drapeau afghan pour l'ouverture de la compétition.

Volley-ball assis, haltérophilie et aviron en salle sont les trois compétitions auxquelles vont participer ces soldats afghans brisés par la guerre. Ils s'entraînent tous les jours dans le gymnase du centre de formation de l'armée, en banlieue de Kaboul.

"Rester enfermé à la maison toute la journée me rendait fou. Venir m'entraîner ici au sein d'une équipe m'aide tant physiquement que psychologiquement", dit Sohail Naseri, amputé des deux jambes il y a six ans suite à l'explosion d'une mine anti-personnel.

Les uns défont sur le bord du terrain leur prothèse, les autres descendent à la force des bras de leur fauteuil roulant laissé en bordure des tapis de mousse où se regroupe l'équipe, vêtue d'un vieux maillot de l'équipe nationale de football.

Positionnés de part et d'autre d'un filet de volley à un peu plus d'un mètre de hauteur, ils commencent, assis à terre, leur entraînement.

Très vite les rires fusent, même si le responsable de l'équipe peste face à l'absence de certains membres à une semaine du départ pour l'Australie.

Mais Sohail, qui apparaît comme le boute-en-train de l'équipe, redevient grave lorsqu'il s'épanche longuement sur la difficulté de vivre en fauteuil roulant en Afghanistan.

"Mentalement c'est très dur. Ici, tu es un héros quand tu as une mitraillette sur l'épaule mais dès que tu reviens blessé tu n'es plus rien. Du jour au lendemain, tu es un vieillard qui a besoin d'aide pour faire le moindre truc", raconte-t-il.

"Certains blessés sont tombés dans la drogue ou même se sont suicidés", dit-il, le regard d'un vert profond. "Moi j'ai quatre enfants à protéger" tranche Sohail, orphelin à l'âge de cinq ans.





"Ces jeux sont une bouffée d'oxygène pour eux, ils retrouvent le goût de la vie", assure le manager de l'équipe, Pir Mohammad Pashton.

"Et c'est également important pour nos soldats au front de savoir qu'il existe des raisons d'espérer même après une grave blessure. Ils savent aussi que notre drapeau afghan sera représenté à Sydney aux côtés de ceux d'autres grandes nations", ajoute-t-il.

Des pages dédiées sur les réseaux sociaux couvriront l'aventure des huit blessés de guerre sélectionnés pour cette édition 2018. "Ca nous motive encore plus pour ne pas décevoir ceux qui nous suivront", dit le manager.

Abdul Hanan Fehrdus, qui a sauté sur une mine il y a six ans dans la province de Kunduz (nord) après en avoir désactivé cinq, a lui aussi perdu ses deux jambes.

"Les six premiers mois ont été très difficiles, j'étais aussi touché mentalement", confie-t-il après un entraînement au développé-couché.

"Mais même si j'ai perdu mes jambes, j'ai toujours un cerveau et j'ai eu une éducation. Je me suis dit que je pouvais encore faire des choses", dit ce père de deux enfants, seul soutien à sa famille.

"Chacun de nous rêve de ramener une médaille de Sydney et moi ce n'est pas une médaille de bronze ou d'argent que je veux, mais une médaille d'or pour mon pays", dit-il déterminé.

Il espère aussi pouvoir rencontrer le Prince Harry qu'il "respecte énormément" pour sa participation aux combats en Afghanistan.

Le jeune Britannique a gagné ses galons lors de deux missions en 2008 puis en 2012 en tant que copilote-artilleur sur des hélicoptères Apache.

"J'ai préparé un drapeau afghan que je lui offrirai", confie-t-il secrètement, les yeux brillant soudain de mille feux.


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