Irak: le nouveau chef d'Al-Qaïda s'affiche à visage découvert

AFP

Bagdad - Une vidéo montrant l'exécution de chauffeurs routiers syriens dans le désert irakien a ravivé la peur dans cette région frontalière, tout en assurant la publicité d'un nouveau chef d'Al-Qaïda qui s'y affiche à visage découvert.

Chaker Wahiyib al-Fahdaoui
Chaker Wahiyib al-Fahdaoui
Jusqu'à sa mort en 2006, le nom qui semait la terreur dans le pays était celui d'Abou Moussab al-Zarqaoui, un leader d'Al-Qaïda connu pour sa cruauté et ses attaques contre la population chiite.

Mais depuis la mise en ligne, le 25 août dernier, d'une vidéo montrant l'assassinat le 2 juin de trois chauffeurs routiers syriens sur une autoroute de l'ouest irakien, la terreur a un nouveau visage: celui de Chaker Wahiyib al-Fahdaoui.

"C'est le seul qui tue à visage découvert (...) Il est dangereux et rusé", estime le colonel Yassin Dwaij, responsable du renseignement pour la police dans la province d'Al-Anbar, dans l'ouest du pays.

La vidéo, mise en ligne d'abord sur internet puis diffusée par la télévision, montre Fahdaoui interrogeant quatre chauffeurs routiers pour connaître leur appartenance religieuse.

Trois des chauffeurs affirment dans un premier temps être sunnites avant qu'on ne découvre, selon la télévision, qu'ils sont en fait alaouites, une branche du chiisme à laquelle appartient le clan du président syrien Bachar al-Assad, en lutte contre les rebelles, y compris ceux liés à Al-Qaïda.

Fahdaoui aligne alors ces trois hommes au bord de la route et les exécute froidement, avant de relâcher le quatrième, un sunnite.

La vidéo montre Fahdaoui le visage découvert, tandis que ses hommes portent des cagoules.

L'opération se déroule en plein jour, sans que les assaillants semblent s'inquiéter de la présence possible de forces de sécurité sur cette autoroute.

Fahdaoui, un Irakien de 27 ans, porte, à la manière des jihadistes, un pantalon bouffant, une longue barbe et un keffieh.

Il s'est forgé une notoriété en combattant les forces américaines avant d'être arrêté puis détenu dans le sud du pays. Condamné à mort et emprisonné dans le nord, il s'est évadé l'an dernier.

Une nouvelle génération "encore plus extrémiste"

Dans les mois qui ont suivi, il s'est affiché de plus en plus en public tandis que le gouvernement le tenait responsable d'un nombre croissant d'attaques.

Cherchant à tirer avantage des manifestations sunnites anti-gouvernementales qui ont enflammé la province d'Anbar (ouest) depuis décembre, il a même fait une apparition publique en mars dernier à Fallouja où, filmé, on le voit déclamer un poème.

Les autorités ont depuis mis sa tête à prix, offrant 50.000 dollars pour sa capture, mais sans succès.

En mai, les autorités l'ont accusé d'être à l'origine de l'enlèvement de 16 policiers sur la route reliant la Jordanie à l'Irak. Douze d'entre eux avaient été tués et quatre blessés.

Depuis la diffusion de la dernière vidéo, Fahdaoui est probablement devenu la figure la plus emblématique de l'Etat islamique de l'Irak et du Levant (EIIL), la branche irakienne d'Al-Qaïda.

"Le terroriste qui a tué les chauffeurs routiers (...) est aujourd'hui une des figures les plus dangereuses d'Al-Qaïda", selon un général d'armée, s'exprimant sous le couvert de l'anonymat.

"Il fait partie d'une nouvelle génération, comme en son temps Zarqaoui, mais encore plus extrémiste", estime-t-il.

Zarqaoui, un Jordanien, connu pour ses tactiques brutales avait fini par se mettre à dos nombre de tribus sunnites de la région, et s'était même querellé avec des hauts dirigeants d'Al-Qaïda.

Avant d'être tué par un drone américain en juin 2006, il apparaissait souvent dans des vidéos en ligne qui le montrait dans des camps jihadistes, ou tirant à l'air au fusil automatique.

Après sa mort, et la décision des forces américaines de recruter des supplétifs parmi les tribus sunnites de la région, la sécurité dans la province s'était peu à peu améliorée.

Mais le mécontentement des tribus vis-à-vis du gouvernement, la proximité de jihadistes en Syrie, et la reprise des attentats en Irak ont ravivé l'insécurité.


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