Jeanne Moreau et Etienne Daho chantent la poésie de Jean Genet
AFP
Paris - L'actrice Jeanne Moreau et le chanteur Etienne Daho ont célébré la poésie de Jean Genet dans un spectacle à Paris en hommage à l'écrivain, comme ils l'ont fait dans un disque sorti à l'automne, dont la chanson "Sur mon cou" est la plus connue.

Etienne Daho et Jeanne Moreau
Les deux complices Jeanne Moreau, tout de blanc vêtue, et Etienne Daho, tout en noir comme ses musiciens, occupent sobrement la scène, une heure durant, pour faire sourdre la poésie du "Condamné à Mort" de Jean Genet. Ce long poème fut écrit à la mémoire d'un "assassin de 20 ans", Maurice Pilorge, exécuté le 17 mars 1939 à Saint-Brieuc, "dont le corps et le visage radieux hantent mes nuits sans sommeil", dit l'écrivain.
C'est la première oeuvre de Jean Genet, écrite à Fresnes où il avait été emprisonné pour vol, et publiée en 1942.
Le poème au verbe cru, mis en musique par Hélène Martin dans des arrangements d'Etienne Daho, conte les fantasmes de l'écrivain durant la dernière nuit du condamné.
Il est tantôt dit par Jeanne Moreau dont la voix rauque oscille entre passion, tendresse, effroi, et monte parfois à la limite du chant, tantôt chanté par Etienne Daho sur un rythme scandé qui enfle dans les moments de grande tension.
Le fond de la scène est noir, et de larges bandes blanches s'y inscrivent peu à peu quand surgit l'aube, comme une lame tranchante de guillotine.
Au moment le plus cru du poème, le chanteur choisit d'en dire les mots plutôt que de le chanter, comme pour être mieux entendu. Au contraire, la musique prend son envol quand il interprète "Sur mon cou", un extrait du poème de Genet qu'il chante depuis dix ans.
Jeanne Moreau fut l'amie de Jean Genet. Dès son entrée en scène, elle lit des extraits de l'ouvrage de Jean-Paul Sartre, "Saint Genet, comédien et martyr", pour éclairer son parcours d'enfant abandonné, de voleur "pris dans le sac" qu'"on cloître", qu'"on emmure", auquel on fait éprouver "la honte d'être tondu" dans la colonie pénitentiaire où il est enfermé.
"Je souffrais cruellement", a dit Genet, un homme qui, selon Sartre, s'opposait "à toute société".