L'Arabie saoudite refuse d'entrer au Conseil de sécurité de l'ONU

AFP

DUBAI (Emirats arabes unis) - L'Arabie saoudite a refusé vendredi d'entrer au Conseil de sécurité de l'ONU, une décision sans précédent visant à protester contre "l'impuissance" de cette instance, en particulier face au drame syrien.

L'Arabie saoudite refuse d'entrer au Conseil de sécurité de l'ONU
Dans un communiqué publié quelques heures après l'élection comme membre non permanent du Conseil de sécurité de ce poids-lourd du monde arabe, qui soutient sans réserve l'opposition syrienne, le ministère saoudien des Affaires étrangères a fustigé la politique de "deux poids, deux mesures" de l'institution au Proche-Orient.

"L'Arabie saoudite (...) n'a pas d'autre option que de refuser de devenir membre du Conseil de sécurité jusqu'à ce que ce dernier soit réformé et qu'on lui donne les moyens d'accomplir son devoir et d'assumer ses responsabilités pour préserver la paix et la sécurité dans le monde", a affirmé le ministère.

Par ce geste, qui constitue une première, l'Arabie saoudite "veut exprimer son indignation face aux pays membres permanents du Conseil de sécurité", a déclaré à l'AFP l'expert saoudien Abdel Aziz Al Sager, directeur du Gulf Research Center.

"Elle veut également exprimer son malaise face à la nouvelle politique de Washington et en particulier aux positions du président Barack Obama sur l'Iran, la Syrie et le Yémen", a-t-il ajouté.

"C'est tout à fait inattendu, nous avons tous dû vérifier dans l'historique du Conseil pour trouver un précédent et il n'y en a pas", a déclaré un diplomate à New York.

La France a dit partager la "frustration" de l'Arabie saoudite, tandis que la Russie a critiqué Ryad, s'interrogeant sur les raisons "étranges" du refus saoudien.

La Turquie a estimé pour sa part que la décision saoudienne faisait "perdre de sa crédibilité" à l'organisation.

Le royaume saoudien, premier exportateur mondial de pétrole, a été élu jeudi, pour la première fois, membre non permanent du Conseil de sécurité de l'ONU, en même temps que le Tchad, le Chili, le Nigeria et la Lituanie. Leur mandat de deux ans doit débuter le 1er janvier 2014.

Le ministère saoudien estime que le fait "de permettre au régime en place en Syrie de tuer son peuple et de le brûler à l'arme chimique au vu et au su du monde entier sans sanctions dissuasives est une preuve claire de l'impuissance du Conseil de sécurité à accomplir son devoir et à assumer ses responsabilités".

"Des mesures efficaces"

Fin septembre, lors de la session de l'Assemblée générale de l'ONU, le ministre saoudien des Affaires étrangères Saoud al-Fayçal avait déjà refusé de s'exprimer à la tribune pour protester contre l'inertie du Conseil de sécurité face à la situation en Syrie et dans les Territoires palestiniens.

Depuis le début de la crise syrienne en mars 2011, la Russie et la Chine se sont opposées à toute résolution condamnant le régime du président Bachar al-Assad.

Ce n'est que le 27 septembre, un peu plus d'un mois après une attaque à l'arme chimique qui a fait des centaines de morts le 21 août près de Damas, que le conseil a adopté, face à la menace de frappes américaines, la résolution 2118 sur le désarmement chimique du pays d'ici mi-2014.

Ryad, un des principaux alliés de Washington au Proche-Orient, a estimé en septembre que l'intervention internationale dans la crise syrienne ne devait pas être réduite aux seules armes chimiques, dans une critique voilée de l'accord russo-américain ayant permis l'adoption de la résolution.

Le royaume avait appelé la communauté internationale à prendre "des mesures efficaces" pour arrêter le bain de sang en Syrie, où les violences ont fait, selon une ONG syrienne, plus de 115.00 morts.

Dans son communiqué de vendredi, le ministère saoudien rappelle aussi que "la question palestinienne demeure depuis 65 ans sans règlement".

Il déplore également que le Conseil ait "échoué" à débarrasser le Proche-Orient des armes de destruction massive, "en raison de son incapacité à soumettre les programmes nucléaires de tous les pays de la région sans exception à la surveillance et aux inspections internationales", dans une allusion à Israël, ou en s'opposant "aux tentatives de tout pays de la région de posséder l'arme nucléaire", dans une référence à l'Iran.

"L'Arabie saoudite estime que l'Iran s'ingère en Syrie, en Irak, au Yémen et à Bahreïn (...) et les Etats-Unis acceptent que l'Iran joue un rôle dans les affaires de la région", a expliqué Abdel Aziz Al Sager.


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