L'affaire McChrystal embarrasse l'Otan

AFP

Bruxelles - La menace de limogeage qui pèse sur le général Stanley McChrystal après ses propos controversés embarrasse les pays de l'Otan car son départ constituerait un mauvais signal au moment où une nouvelle stratégie est mise en place en Afghanistan face aux talibans.

Stanley McChrystal
Stanley McChrystal
L'inquiétude au sein de l'alliance a été illustrée par la prompte réaction de son secrétaire général, Anders Fogh Rasmussen. Le Danois s'est empressé d'apporter dès mardi son soutien au commandant des forces internationales en Afghanistan (Isaf), en pleine tourmente suite à ses critiques contre l'exécutif américain.

"L'article de Rolling Stone est assez regrettable, mais c'est juste un article. Nous sommes au milieu d'un conflit bien réel, et le secrétaire général a pleinement confiance dans le général McChrystal en tant que commandant des forces de l'Otan et dans sa stratégie", a indiqué son porte-parole.

Il a été rejoint mercredi par le ministre allemand de la Défense, Karl-Theodor zu Guttenberg.

"J'ai le plus grand respect pour le général McChrystal, nous avons travaillé extrêmement bien ensemble", a-t-il déclaré à la télévision publique, "il est le garant de la nouvelle stratégie en Afghanistan"

En privé, beaucoup parmi les délégations de l'Otan à Bruxelles jugent qu'il sera difficile au général de se maintenir après cet écart et que les relations entre le commandant de l'Isaf, connu pour son franc parler, et Washington sont houleuses depuis déjà longtemps. Ils se disent dans le même temps préoccupés pour la suite.

Les Etats-Unis "ont un problème", souligne un diplomate de l'Alliance atlantique. "S'ils le congédient, c'est le concepteur de la nouvelle stratégie en Afghanistan que vous mettez la porte et donc vous portez préjudice à l'effort" en cours sur place, estime-t-il.

Dans le même temps, "s'ils ne le congédient pas, ils cautionnent le fait qu'un général puisse critiquer sa hiérarchie politique. Donc ils sont perdants dans les deux cas", ajoute-t-il.

"On regrettera beaucoup s'il doit partir. L'Isaf perdrait un général excellent dans une situation qui n'est pas du tout facile en Afghanistan", estime un diplomate d'une autre délégation importante de l'alliance. "On craint que cela laisse un vide", note-t-il.

Les dissensions entre l'exécutif américain et le général McChrystal éclatent au grand jour au moment même où l'Isaf entend regagner l'initiative militaire dans ce pays d'ici la fin 2010 et inverser le cours de la guerre grâce à la mise en place d'une nouvelle stratégie de contre-insurrection, décidée fin 2009.

Le général américain a obtenu l'envoi de quelque 40.000 soldats supplémentaires en Afghanistan.

Sa stratégie consiste pour les troupes internationales à se faire mieux accepter de la population locale, à les prendre davantage en compte ainsi qu'à préparer le terrain au transfert à l'armée et à la police afghanes des missions de maintien de la sécurité dans le pays.

Or, cet objectif est une condition clé d'un retrait progressif des troupes internationales. Actuellement l'Isaf, sous commandement de l'Otan, compte quelque 120.000 soldats sur place originaires de 45 pays. La majorité sont américains.

"La question est de savoir si Washington soutient vraiment la stratégie de contre-insurrection du général McChrystal ou pas", s'interroge un responsable militaire de l'Otan, sous couvert de l'anonymat.

"S'il y a un réel désaccord sur la stratégie à suivre entre le commandant en chef de l'Isaf et l'exécutif américain, cela risque de poser problème pour la suite, en particulier pour les alliés des Etats-Unis engagés en Afghanistan", ajoute-t-il.


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