La France serait la 1re puissance publique à opter pour la coupure de l'accès internet

AFP/Pascale MOLLARD-CHENEBENOIT

Avec son texte réprimant le téléchargement illégal, présenté aux députés le 29 avril pour une adoption prévue mi-mai, la France se met dans la position délicate d'être la première puissance publique à se lancer dans la coupure de l'accès internet, mesure controversée et impopulaire.

Le gouvernement français a opté pour la voie législative pour élaborer un dispositif spécifique de "réponse graduée" contre le piratage des contenus (musique, films) sur internet.
La Nouvelle-Zélande avait dans un premier temps adopté une position proche de celle de la France avant de faire marche arrière devant les réactions des internautes. Le gouvernement néo-zélandais avait élaboré une loi prévoyant que les fournisseurs d'accès à internet (FAI) coupent cet accès aux personnes soupçonnées de téléchargement illégal. Mais devant l'hostilité suscitée par ce projet qui devait entrer en vigueur en février, Wellington a préféré suspendre puis retirer ce texte. Un nouveau texte de loi doit être rédigé.
L'autre spécificité de la solution française repose sur la création d'une haute autorité administrative. Elle sera chargée d'envoyer des avertissements à l'abonné suspecté de téléchargement illégal puis de suspendre l'accès à internet en cas de récidives.
Aux États-Unis, l'industrie américaine du disque a mené une chasse aux pirates très active via les tribunaux pendant plusieurs années. Mais depuis décembre, elle a changé son fusil d'épaule et travaillé elle aussi à la mise en place d'une "réponse graduée".
La RIAA (Recording Industry Association of America) a annoncé il y a quatre mois être parvenue à un accord "confidentiel" avec d'importants FAI sur ce type de dispositif.
Depuis, elle est toujours en négociations avec ces FAI et aucun opérateur majeur n'a encore annoncé publiquement un accord. L'envoi d'avertissements est prévu mais la RIAA voudrait aller plus loin et obtenir qu'ils coupent l'accès internet des pirates. Ce que certains FAI ne semblent pas vraiment disposés à faire.
En Grande-Bretagne, les fournisseurs d'accès ont signé un accord en juillet dernier avec l'industrie du disque pour réduire les téléchargements illégaux en envoyant des lettres d'avertissement aux internautes repérés. Mais il n'y pas de sanction à la clef.
En Irlande, un accord entre le principal fournisseur d'accès et l'industrie du disque a été signé en janvier. Il permettra aux ayants droit de récupérer les adresses IP (liées à l'ordinateur) des internautes. In fine, il pourra y avoir sanction.
En Suède, quatre responsables de The Pirate Bay, un des principaux sites de téléchargement illégal au monde, ont été condamnés récemment à un an de prison ferme et à 2,7 millions d'euros de dommages et intérêts.
En Allemagne, après l'entrée en vigueur au 1er janvier 2008 d'une loi prévoyant jusqu'à 10.000 euros d'amende pour chaque fichier illégalement téléchargé, les tribunaux ont dû initialement faire face à de nombreuses affaires, mais le texte s'est avéré difficilement applicable.
Le projet de loi français se heurte à l'hostilité du Parlement européen en raison de la sanction choisie. Un amendement socialiste au "paquet télécom" dirigé contre le texte a été adopté à une large majorité en septembre avant d'être rejeté par le Conseil européen en novembre. Il a été à nouveau adopté par les eurodéputés le 21 avril en commission dans le cadre de la seconde lecture du "paquet télécom".
"Nous ferons en sorte de préserver l'unanimité du Conseil européen" contre cet amendement, a indiqué le ministère français de la Culture.


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