La justice impose l'interdiction du film "Love" aux moins de 18 ans

AFP

Le film "Love", de Gaspar Noé, doit être interdit aux moins de 18 ans en raison de ses scènes de sexe non simulées, selon une décision du tribunal administratif de Paris communiquée lundi.

Le cinéase a qualifié cette décision d'"aberration", estimant dans un entretien au quotidien Libération qu'"il y a un risque que les cinéastes ou scénaristes s'autocensurent".

Le juge du référé, dans une décision daté du 31 juillet, a suspendu le visa d'exploitation du film projeté sur les écrans français depuis le 15 juillet, "en tant qu'il n'interdit pas la représentation du film aux mineurs de 18 ans", mais seulement aux moins de 16 ans.

Saisi par l'association Promouvoir, une organisation qui vise "la promotion des valeurs judéo-chrétiennes dans tous les domaines de la vie sociale", le juge estime que la "répétition" et l'"importance dans le scénario" de scènes de sexe non simulées sont "de nature à heurter la sensibilité des mineurs".

Par deux fois, en juin puis début juillet, après avoir été saisie à nouveau par la ministre de la Culture, la commission de classification des oeuvres du Centre national du cinéma (CNC) a recommandé une interdiction aux moins de 16 ans seulement. Un avis suivi par la ministre pour délivrer le visa début juillet.

Gaspar Noé a mis en cause l'avocat de Promouvoir, Patrice André. "On est clairement face à quelqu'un qui est proche de Bruno Mégret, de la Manif pour tous, et qui est dans une stratégie d'autopromotion", a-t-il dit à Libération.

"Mon film est inoffensif, mais il semble déranger. Ce qui m'angoisse, c'est que, à cause de ce genre de choses, des réalisateurs ou producteurs peuvent se mettre à avoir peur. Il y a un risque que les cinéastes ou scénaristes s'autocensurent", a estimé le réalisateur.

Présenté au dernier festival de Cannes, "Love", tourné en 3D, raconte la relation entre deux jeunes gens au moyen de flash-backs entrecoupés de voix-off, et montre de nombreuses scènes de sexe, en partie non simulées, parfois en gros plan : une femme masturbant un homme jusqu'à l'éjaculation, une scène d'amour à trois, une autre dans un club échangiste, une avec un travesti.

Vincent Maraval, co-producteur du film, a déploré cette décision sur Twitter. "La décision est maintenant dans les mains du Conseil d'Etat. On devrait en savoir plus sur la France très bientôt", a-t-il écrit, laissant entendre qu'il comptait faire appel de cette décision.

"Quand on dit qu'on veut faire un film sur une passion amoureuse, effectivement on fait un film où les gens s'aiment, s'embrassent, font l'amour", affirmait à l'AFP en juillet le réalisateur argentin de 51 ans, déjà auteur du film controversé "Irréversible" en 2002".

Pour Christophe Tardieu, directeur général délégué du CNC, la décision du tribunal administratif de Paris ne constitue toutefois pas vraiment une surprise: "On va certainement décider d'interdire le film aux moins de 18 ans, ce film va continuer à avoir une vie en salle", a-t-il indiqué à l'AFP.

Le film n'est plus diffusé que dans 33 salles en France, dont 7 à Paris, selon le décompte mentionné dans l'ordonnance.

L'association Promouvoir avait obtenu le 1er juin, devant le Conseil d'Etat, l'annulation du visa d'exploitation du film d'horreur américain "Saw 3 D Chapitre final", interdit jusque-là aux moins de 16 ans mais que l'association estimait devoir être interdit à tous les mineurs.


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