Le minimaliste "The American" révèle un George Clooney taiseux et insondable
AFP
Los Angeles - "The American", thriller minimaliste et résolument austère du cinéaste néerlandais Anton Corbijn, offre à George Clooney un rôle de meurtrier aussi taiseux qu'insondable, plutôt inattendu dans la carrière du beau gosse d'Hollywood.

George Clooney
"The American", qui sort mercredi sur les écrans", met en scène Jack, alias M. Butterfly -- en référence à l'un de ses tatouages et au lien secret qui semble l'unir aux papillons --, un homme dont on ne saura presque rien si ce n'est qu'il est assassin professionnel, au service d'un truand basé en Italie.
Après un bain de sang en Suède, il se réfugie dans un petit village italien, perché dans les montagnes des Abruzzes, où il attend les ordres du "boss".
Il se voit finalement confier la tâche de fabriquer une arme sophistiquée pour une mystérieuse femme dont on ne saura, là encore, quasiment rien (la Néerlandaise Thekla Reuten), tout en entretenant une relation avec une ravissante prostituée (interprétée par l'Italienne Violante Placido).
Visiblement lassé de cette existence de paria, pétrie de solitude et de mensonge, Jack avertit son commanditaire que ce sera sa dernière mission.
Sur cette trame ténue, Anton Corbijn tisse un film minimaliste et taillé à la serpe, admirablement éclairé mais tellement avare de sentiments et d'émotions qu'il n'évite pas une certaine sécheresse.
"Les histoires de rédemption m'ont toujours intéressé", déclarait récemment le cinéaste en Italie. "Je pense qu'il y a toujours un moment dans la vie où l'on se demande si l'on ne pourrait pas tout changer".
"Le personnage de Jack a la cinquantaine et ce questionnement vient tard dans sa vie", ajoutait-il.
George Clooney, opaque et insondable à souhait, se prête à cet exercice de style avec beaucoup de naturel, dans la lignée des grands acteurs taiseux d'Hollywood, de Clint Eastwood à Steve McQueen, et avec un style qui renvoie davantage aux années 70 qu'aux héros solitaires de notre temps.
Sa "planque" justifie qu'il n'utilise aucun des moyens de communication moderne -- ordinateur, téléphone portable --, leur préférant les bonnes vieilles cabines téléphoniques, qui renvoient, elles aussi, à des temps révolus.
"J'aime beaucoup l'idée d'un monde sans tous ces objets, et j'adore les films des années 70, qui en étaient dépourvus", ajoute le cinéaste.
Ancien directeur de la photographie, Anton Corbijn a particulièrement soigné la lumière et composé des cadrages d'une grande beauté, jouant avec les escaliers et ruelles du village, traités comme un labyrinthe faisant écho à la complexité intérieure du personnage de Jack.
Sorti en Amérique du Nord en septembre, le film a récolté à ce jour 35 millions de dollars au box-office, un chiffre très honorable pour une oeuvre qui, aux Etats-Unis, tient davantage de l'art et essai que de la production grand public.