Les autorités marocaines s'en prennent à l'homosexualité
magharebia.com/Imane Belhaj
Les autorités marocaines souhaitent lutter contre toutes les pratiques et retirer de la circulation l'ensemble des brochures, livres et publications qui cherchent à saper les valeurs religieuses et éthiques du pays.
Cette initiative de l'Etat intervient en réponse à de récents articles parus dans la presse appelant à une plus grande tolérance envers l'homosexualité. La source en est un article de presse de Samir Berkashi, le coordinateur de "Kif Kif", une association qui lutte pour la défense des intérêts des homosexuels.
Berkashi affirme que son association bénéficie du soutien de partis politiques, d'associations de défense des droits de l'Homme et de missions diplomatiques étrangères au Maroc, soulignant que les homosexuels sont partout, dans les médias, dans la société civile et dans les milieux politiques au Maroc.
Kif Kif "fonctionne au Maroc par le biais d'une association intermédiaire reconnue par la loi", explique-t-il, car elle "ne peut fonctionner publiquement tant que la loi continuera à interdire l'homosexualité."
Dans le cadre d'une mesure inattendue et sans précédent en faveur des militants des droits des homosexuels, le responsable de Kif Kif envisage d'organiser une conférence de presse le 15 avril à Marrakech.
Mais Berkashi a cependant réfuté un article controversé publié par le quotidien arabophone As Sabah concernant son entretien avec le journal francophone Aujourd’hui Le Maroc.
"Récemment, des voix se sont faites entendre dans les médias pour tenter de promouvoir une certaine forme de comportement honteux, provoquant ainsi l'opinion publique et ne tenant aucun compte des valeurs religieuses de notre société", affirme le rapport du ministère de l'Intérieur.
Interrogés sur le sujet, les gens de la rue réagissent différemment à la question de l'homosexualité, allant de l'acceptation au rejet le plus absolu.
"L'homosexualité devrait être considérée dans le cadre du respect des droits de l'Homme et de la diversité", explique Khaled Daoui, un fonctionnaire.
D'autres font entendre des avis totalement différents.
"Cela est interdit par notre religion et nos traditions. Dieu a interdit de tels péchés", affirme Soumia Tazi, une enseignante.
"L'homosexualité vient des films occidentaux, des émissions de télévision et des chaînes pornographiques qui encouragent de telles pratiques, qui sont reprises par les jeunes générations qui les suivent, sans être conscients des conséquences", ajoute Mohamed Zahi, un étudiant.
L'homosexualité est illégale au Maroc, et passible de "six mois à trois ans d'emprisonnement et d'une amende de 200 à 1 200 dirhams".
"Le rapport du ministère de l'Intérieur laisse planer une sorte de menace et une atteinte à la liberté d'expression, dans la mesure où cela constitue une atteinte aux libertés personnelles", a expliqué Khadija Radi, directrice de l'Association Marocaine des Droits de l'Homme, à Magharebia.
"Le sujet est en grande partie sujet à l'interprétation, car elle ne traite pas exclusivement des homosexuels, mais aussi d'autres choses", ajoute-t-elle, se référant à la bataille récemment lancée par l'Etat contre la propagation du chiisme.
Quant à Kif Kif, l'un de ses membres, qui a préféré conserver l'anonymat, a déclaré à Magharebia que son association "ne cédera pas à la menace de l'Etat, et poursuivra ses activités dans le respect de la loi, de la liberté personnelle et des droits de l'Homme".
Ce jeudi 26 mars, Berkashi a déclaré à la presse espagnole que le gouvernement marocain n'avait pas tenté de l'empêcher d'organiser sa conférence de presse du 15 avril. Mais, a-t-il ajouté, si les pouvoirs publics devaient nous interdire, il se conformerait à cette décision.