Les eurodéputés veulent limiter le développement des agrocarburants

AFP

Bruxelles - Les eurodéputés veulent limiter le développement des biocarburants actuels, très décriés car issus de cultures vivrières, même s'ils ont approuvé jeudi l'objectif européen d'intégrer au moins 10% d'énergies renouvelables dans le carburant consommé en 2020.

"Nous avons mis un frein à cette folie des investissements dans la première génération d'agrocarburants", s'est réjoui jeudi le rapporteur Claude Turmes, un eurodéputé vert qui prône leur disparition pure et simple.

Le vote de jeudi, au sein d'une commission parlementaire spécialisée, celle de l'industrie et de l'énergie, est une étape intermédiaire. Mais il donne le ton des élus sur un projet de loi très attendu, visant à accroître l'utilisation des énergies renouvelables dans l'UE.

Les 27 ont décidé de consommer une part obligatoire de 20% d'énergies renouvelables d'ici 2020 dans les transports, l'électricité, le chauffage et la climatisation.

Mais un sous-objectif contraignant de 10% dans les transports est attaqué en raison de la controverse entourant les biocarburants, accusés par leurs détracteurs de contribuer à la crise alimentaire et la déforestation.

Les députés européens ont maintenu jeudi ce but. Mais pour eux, au moins 4O% de ces énergies renouvelables utilisées dans les véhicules en 2020 devront provenir d'électricité ou d'hydrogène, ainsi que de biocarburants dits de "deuxième génération", non issus de la chaîne alimentaire mais encore balbutiants.

Parmi ces derniers, ils mentionnent les carburants produits à partir de déchets et d'ordures, de biomasse ligno-cellulosique et des algues. Ils incluent toutefois les biocarburants produits à partir de céréales cultivées sur des terres agricoles très dégradées.

Aujourd'hui, les Européens consomment environ 3% d'agrocarburants. Les eurodéputés proposent de passer à 4% seulement en 2015, date intermédiaire à laquelle la deuxième génération d'énergies renouvelables atteindrait une part d'au moins 1%.

Les biocarburants actuels, fabriqués par exemple à partir du colza, pourront certes continuer leur développement pour s'inscrire dans l'objectif contraignant des 10% à l'horizon 2020.

Reste qu'au delà d'un certain seuil (6%), ils ne seront plus comptabilisés dans les performances requises de chaque Etat membre.

De quoi susciter l'ire des industriels, qui soulignent que les technologies de deuxième génération sont loin d'être au point. Comment vérifier en outre que l'électricité utilisée dans une voiture électrique ne proviendra pas d'une centrale à charbon?, arguent-ils.

Coup de grâce, les eurodéputés exigent, au plus tard en 2014, une analyse approfondie de la pertinence des objectifs européens de 2020, notamment au regard de la sécurité alimentaire. Une idée "dissuasive pour les investisseurs", a critiqué un responsable de la Commission européenne.

De plus, les élus se sont montrés plus sévères que les gouvernements de l'UE sur les critères "verts" qui devront encadrer les agrocarburants.

Seuls ceux permettant une réduction de 45% des émissions de gaz à effet de serre, comparé aux carburants fossiles, doivent être pris en compte dans les plans nationaux. Et à compter de janvier 2015, ce seuil devrait être d'au moins 60%.

"Aujourd'hui tout producteur peut arriver à cette efficacité en utilisant une meilleure technologie", argue M. Turmes.

Les eurodéputés ont par ailleurs prôné un "mécanisme de pénalités directes" à l'encontre des pays qui ne rempliraient pas leurs engagements sur les énergies renouvelables.

Reste à présent au Parlement en session plénière à se prononcer et aux Etats membres de l'UE à donner leur point de vue. Les débats s'annoncent animés durant la présidence française de l'UE, désireuse d'aller vite.