Les perspectives d’un nouveau gouvernement libanais

CGNews

Nizar Abdel-Kader (Hdhod - Cgnews): Contrairement aux attentes des enquêteurs et analystes, les résultats officiels des élections libanaises, comme annoncé par le ministre de l’Intérieur, Ziad Baroud, le lundi 8 juin, indiquent que la coalition du 14 Mars, menée par Saad Hariri, a obtenu la majorité à l’assemblée avec 71 sièges sur 128.

Les perspectives d’un nouveau gouvernement libanais
La coalition du 8 Mars, ou opposition, menée par le Hezbollah et le général Michel Aoun, a remporté 51 sièges, soit un siège de moins que dans la composition du Parlement sortant. La coalition a reconnu sa défaite et a annoncé qu’elle ‘‘accepterait la volonté du peuple’’. Le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a indiqué, lors d’une allocution télévisée le 8 juin dernier: ‘‘Nous acceptons ces résultats avec fair-play et dans un esprit démocratique et nous admettons que le camp au pouvoir ait remporté la majorité parlementaire.’’

Toutefois, il a souligné que majorité parlementaire ne signifie pas majorité populaire. Hassan Nasrallah a associé la possibilité de créer un Etat puissant et compétent à la volonté des partis de part et d’autre du clivage politique.

Maintenant que les élections sont terminées, la question la plus urgente et la plus logique à se poser est la suivante : A quelle sorte d’interaction politique faut-il s’attendre au sein du nouveau Parlement? La deuxième question consiste à savoir si, en conservant l’équilibre du pouvoir précédent, le Liban reproduirait le schisme qui divise la scène politique et raviverait plutôt que ne résoudrait les conflits sous-jacents entre les deux camps ennemis.

L’accord de Doha, passé entre les deux principales coalitions politiques et qui a abouti à la formation d’un gouvernement d’unité nationale intérimaire, a permis au Liban d’échapper de peu à la guerre civile mais il ne visait pas à apporter une solution de rechange définitive au texte de la constitution ou aux règles de l’accord de Taëf qui a mis fin à de longues années de guerre civile au Liban.

L’accord a fourni un cadre pour une trêve temporaire et a préservé les principaux intérêts de l’ensemble des parties. Il a ouvert la voie à l’élection d’un nouveau président et à la formation d’un gouvernement de coalition et il a préparé le terrain pour de nouvelles élections parlementaires. Sur la base dudit accord, les élections du 7 juin étaient supposées offrir un réel espoir de voir une solution à la crise politique et une légitimation du ‘‘nouveau’’ gouvernement majoritaire.

Malgré les débats sectaires et communautaristes qui ont proliféré, les élections ressemblaient plus à un référendum sur la souveraineté qu’à un simple vote pour choisir les membres du nouveau parlement. D’où une forte radicalisation de la campagne de part et d’autre. Les acteurs externes ont contribué à cette radicalisation en prenant de plus en plus ouvertement position au fur et à mesure qu’avançait la campagne.

Si ce scénario devait persister, la confrontation entre la coalition du 14 Mars et l’opposition ne pourrait cesser, bien qu’elle puisse se poursuivre de différentes manières et avec de nouvelles exigences. Une chose ne changera pas: le fait que le Hezbollah insiste pour maintenir son rôle de force de la résistance armée.

La coalition du 14 Mars est vraiment en droit de célébrer sa victoire: l’opposition n’a plus de raison de contester sa réelle majorité dans la nouvelle assemblée. Ces élections ont conféré une très nette autorité à la coalition du 14 Mars.

Les discours modérés prononcés par Hariri pendant la campagne électorale ainsi que lors de la déclaration de la victoire du 14 Mars prouvent qu’il a mérité ses pouvoirs de chef. La voie s’ouvre à lui pour devenir le prochain Premier ministre sans qu’il ne soit contesté par une quelconque faction d’opposition. Mais ce qui octroie encore plus de crédit à Hariri, c’est le fait que la victoire ait eu lieu en vertu d’une loi électorale conçue par l’opposition visant à lui conférer un avantage.

Le risque de voir le Hezbollah contrôler le parlement et le nouveau gouvernement est écarté. Cependant, l’incertitude concernant un retour à de vieilles pratiques de la part de l’opposition demeure. Les chefs de l’opposition ont, à plusieurs reprises, réitéré leur demande que soient maintenus à la fois la résistance armée et le droit de veto au sein du nouveau gouvernement.

Avec la nouvelle majorité du 14 Mars, il n’y aura pas de changement radical de la politique. La coalition devrait proposer la formation d’un nouveau gouvernement, mais, jusqu’ici, elle a clairement précisé qu’elle n’accorderait pas de droit de veto à l’opposition. Le désaccord sur ce point reste le principal obstacle au processus de formation d’un gouvernement et risque de conduire à une nouvelle crise et à un retour de la violence dans les rues, comme ce fut le cas l’an dernier. Selon certaines sources issues de la coalition du 14 Mars, un compromis pourrait être trouvé en accordant le droit de veto au président Michel Suleiman plutôt qu’à l’opposition. Mais ce pourrait être contesté par le Mouvement Patriotique Libre de Michel Aoun qui a déjà accusé le président de s’aligner sur la majorité.

Il reste encore possible pour Hariri d’engager Nasrallah dans un dialogue constructif pour obtenir son soutien en vue de former un nouveau gouvernement avec un programme clair tourné vers une réforme politique et administrative. La priorité serait donnée à une nouvelle loi électorale alors que toutes les questions qui prêtent à controverse, dont la stratégie de défense et l’avenir de la résistance et ses armes, seraient confiées au forum de dialogue national. S’ils ne peuvent pas réaliser de tels progrès, les deux camps se prépareront alors pour une nouvelle crise qui plongera une fois de plus le pays dans le chaos et l’instabilité.


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