Mali : Dicko, l’imam qui a renversé le président Keita, revient diriger la prière

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L'imam Mahmoud Dikco, 66 ans, s'est fait un nom lors des manifestations généralisées ayant conduit au renversement du président Ibrahim Boubacar Keïta, le 18 août.

En dépit de son influence remarquable sur la scène politique, l'imam Mahmoud Dicko réaffirme qu'il restera un imam et ne deviendra point un homme politique.

Dicko, l'un des leaders du mouvement du 5 juin, des forces de l’opposition (M5 RFP), est décrit comme une figure qui transcende les frontières politiques, loin de tout extrémisme, avec un langage simple et un style prônant les valeurs morales.

Né à Tombouctou en 1954, Mahmoud Dicko, s’est dirigé vers la Mauritanie puis s’est installé en Arabie Saoudite pour achever ses études à l'Université de Médine avant de retourner au Mali, où il a adopté la culture islamique d'Afrique de l'Ouest et est resté proche de la pensée soufie.

Il est connu pour ses discours qui soulignent l'importance de l'unité et a influencé positivement la formation de la société dans les domaines de la justice sociale et des droits de l'homme, en plus des services religieux.

En 2008, il a été élu président du Conseil suprême islamique du Mali. Pendant son mandat, achevé en 2019, Dicko avait négocié la libération de Asimi Guetta, l'actuel chef du conseil militaire.

Après avoir quitté son poste à la tête du Conseil suprême islamique, il a fondé en septembre 2019 la Coordination des mouvements, associations et sympathisants de l'imam Mahmoud Dicko.

** Ceux qui trahissent le peuple

En août 2019, Dicko a joué un rôle crucial dans la démission du Premier ministre, Soumeylou Boubèye Maïga, responsable de conflits ethniques dans lesquels 160 personnes ont été tuées, le 23 mars de la même année.

Après la démission de Maïga, l’influence de Dicko sur la scène politique s’est intensifié, tandis que lui réaffirme n’avoir aucune ambition politique.

“Je mène une guerre contre ceux qui ont trahi le peuple malien. Je ne suis pas celui qui détermine les leviers du pouvoir dans le pays, ni le président. Je veux juste la paix”, avait-il ainsi souligné lors du premier meeting de la Coordination des mouvements, associations et sympathisants de l'imam Mahmoud Dicko (CMAS).

** Rassemblement de l'opposition

Le 30 avril, la Cour constitutionnelle a modifié une trentaine de résultats aux élections législatives, dont dix étaient en faveur du parti présidentiel, ce qui a déclenché, début mai, des manifestations populaires appelant au départ de Keïta.

L'imam Dicko est descendu dans la rue pour exiger la démission de Keita, après l’avoir pleinement soutenu lors des élections de 2013.

La Coordination des mouvements, associations et sympathisants (CMAS) s'est uni au Mouvement du 5 juin (Mouvement 5-M5) et à la Fédération des forces patriotiques (RFP), et ils ont tous fusionné sous le nom de «Mouvement du 5 juin - Rassemblement des forces nationales au Mali» (RFP M5).

En effet, le mouvement du 5 juin (Mouvement 5-M5) tire son nom des manifestations qui ont eu lieu après la prière du vendredi ce jour-là, appelant au départ de Keïta, réélu en 2018 pour cinq ans.

** Le soutien de la confrérie Tijaniya

L'imam Dicko a reçu le soutien de Muhammad Filido, le cheikh de l'ordre soufi de Tijaniyya, né dans la ville de Neuro à la frontière avec la Mauritanie.

L'appel à la rébellion et à la désobéissance civile du M5 RFP a conduit à la montée du mouvement parmi le peuple, notamment avec la présence de deux leaders d'opinion dont l'influence sur la société et la politique ne peut être niée.

Les efforts du mouvement ont rencontré une large réponse qui s'est étendue de Bamako à Tombouctou, et les manifestations exigeant la démission de Keïta se sont intensifiées en conséquence.

** “Je suis un imam et je le resterai”

Le jour où la M5 a annoncé intensifier les manifestations et durcir sa rhétorique, l'armée a quitté sa caserne pour la quatrième fois dans l'histoire du Mali.

Les soldats rebelles ont arrêté Keita, après avoir refusé lors de ses demandes les plus célèbres de démission, et l'ont emmené dans une caserne militaire de la ville de Katy, à l'extérieur de la capitale, le 18 août.

L’opposition a annoncé qu'elle n'était pas au courant du coup d'État, mais l'a soutenu, et a organisé un grand rassemblement à Bamako, le 21 de ce mois, pour célébrer la chute de Keita.

Alors que les dirigeants d'opposition ont remercié le peuple malien, lors de cette manifestation, l'imam Dicko a répondu à la question intrigante, en appelant le peuple à s'unir et à s'éloigner de l'idée de vengeance, “je suis un imam et je le resterai, maintenant je retourne dans ma mosquée”.


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