AFP
Louise Arbour, la représentante spéciale de l'ONU pour les migrations, est "très confiante" sur l'avenir du Pacte mondial sur les Migrations, qui doit être adopté lundi à Marrakech (Maroc), malgré le retrait de certains pays, et les campagnes virulentes de désinformation.
Q: Plusieurs pays -Autriche, Italie, Pologne, Hongrie, Bulgarie, Slovaquie, République tchèque, Suisse, Australie, Israel...- ne veulent pas participer à l'adoption du Pacte à Marrakech, comment voyez-vous l'avenir de cet accord?
R: "Je suis très confiante: des Etats en grand nombre continuent de tenir parole, ils se sont entendus le 13 juillet à New York après des négociations très sérieuses et très intenses. Les pays qui se désengagent aujourd'hui de ce processus avaient quand même obtenu des concessions de leurs partenaires pendant les négociations et je dois avouer que je trouve cela un peu surprenant".
Q: Quels sont les enjeux du Pacte?
R: "Il y a plusieurs enjeux différents, des enjeux économiques pour maximiser les effets positifs de la migration sur l'économie des pays d'accueil, sur les pays d'origine, sur les migrants eux-mêmes, sur les communautés qui les accueillent. Il y a des enjeux de nature humanitaire: sauver des vies, mieux coopérer et beaucoup mieux gérer la migration irrégulière, avec des gens qui sont dans des pays de transit dans des situations très vulnérables. Il y a donc des aspects sécuritaires, politiques, économiques, humanitaires".
Q: Comment expliquez-vous les réactions négatives suscitées par le Pacte?
R: "La conversation sur la migration, pendant très longtemps, a toujours été préoccupée par les aspects négatifs: dans les médias, dans les conversations, il y avait beaucoup d'emphase sur la migration irrégulière (...). Le processus aux Nations unies, en fait, a contribué à rétablir un équilibre pour souligner en partie ces aspects positifs. On revoit (dans le même temps) faire surface ce langage, qui est dans certains cas xénophobe, mais qui, dans certains cas, exprime des préoccupations tout à fait légitimes. Ce qui est important, c'est que la conversation soit basée sur la réalité, pas sur une espèce de mythologie par rapport à la migration et que les gouvernements mettent en place des politiques qui reflètent leurs intérêts et non pas des perceptions erronées du facteur +migration+".
Q: D'où viennent, à votre avis, les campagnes virulentes de désinformation sur le contenu du Pacte?
R: "Beaucoup des attaques qu'on voit sur les réseaux sociaux, ou dans les médias en général, sont ou bien basées sur une très mauvaise compréhension du texte -il faut le lire quand même, c'est un texte très long et détaillé-, ou bien basées sur l'ignorance ou sur la mauvaise foi parce que, quand on entend répéter constamment que ce pacte porte atteinte à la souveraineté des états, il faut vraiment se demander quel document ils ont lu! Le Pacte exprime de façon explicite que la souveraineté des Etats est la pierre angulaire de la politique migratoire. Comment peut-on imaginer que presque 190 Etats réunis à New York auraient par inadvertance abandonné leurs souveraineté et leurs intérêts nationaux?"