Pakistan: l'ex-président Musharraf en détention provisoire pour deux semaines
AFP
Islamabad - Un tribunal pakistanais a prolongé samedi de deux semaines la détention provisoire de Pervez Musharraf, enferrant encore plus l'ancien président, rattrapé par plusieurs anciennes affaires, dans des ennuis judiciaires qui n'en finissent plus de pourrir son retour d'exil.
La justice l'avait placé vendredi en détention provisoire pour deux jours, une première pour un ancien chef des armées dans un pays à l'histoire jalonnée de coups d'Etat et où l'institution militaire reste très puissante.
M. Musharraf s'est présenté samedi devant un tribunal antiterroriste d'Islamabad pour une nouvelle confrontation avec la justice, vieille rivale qu'il n'avait cessé d'affronter lorsqu'il était au pouvoir, entre son coup d'Etat militaire en 1999 et sa démission en 2008.
Celle-ci, qui ne l'a pas lâché depuis son retour fin mars après plus de quatre ans d'exil, l'accuse notamment d'avoir violé la Constitution à de multiples reprises, des abus qu'elle assimile à des "actes terroristes contre l'Etat".
M. Musharraf était convoqué samedi à propos du renvoi illégal de juges lorsqu'il avait imposé l'état d'urgence en 2007, une décision qui avait accéléré sa chute l'année suivante, lorsqu'il se résolut à redonner le pouvoir aux civils.
Il est arrivé au tribunal en véhicule blindé, entrant dans le bâtiment sous la protection de dizaines de gardes et sous les huées de centaines d'avocats rassemblés devant pour l'accueillir à leur manière.
"Dehors, Musharraf, dehors!", "Sois maudit pour le reste des temps, Musharraf", et "Chaque ami de Musharraf est un traître"!, scandaient notamment les manifestants en bousculant un peu les forces de sécurité, sans incident notable.
A l'issue de l'audience, "le tribunal a ordonné une détention préventive de deux semaines", a annoncé à l'AFP Muhammad Amjad, porte-parole du parti de M. Musharraf, l'APML (All Pakistan Muslim League).
"Nous allons maintenant nous pourvoir devant de plus hautes juridictions pour demander qu'il soit libéré sous caution", a-t-il ajouté.
"Nos avocats ont démenti les allégations selon lesquelles le général Musharraf a renvoyé des juges et les a maintenus en résidence surveillée avec leur famille pendant six mois. Ceci est totalement faux", a-t-il souligné.
L'ancien président est dans un premier temps retourné après l'audience au quartier général de la police de la capitale Islamabad où il avait passé la nuit, ont indiqué à l'AFP plusieurs responsables de sécurité.
Outre l'affaire des juges, Pervez Musharraf est mis en cause par la justice dans plusieurs affaires, notamment les meurtres du chef indépendantiste de la province du Baloutchistan (sud-ouest) Akbar Bugti et de l'ancien Premier ministre Benazir Bhutto.
Des avocats pakistanais tentent aussi de convaincre la Cour suprême de le juger pour "haute trahison" -- un crime passible de la peine de mort ou de la prison à perpétuité -- pour avoir imposé l'état d'urgence en 2007 alors qu'il régnait sur la seule puissance musulmane dotée de l'arme nucléaire.
Samedi, la Cour suprême a décrété la constitution d'un panel de trois juges chargée de reprendre lundi les auditions dans cette affaire.
Le général Musharraf était revenu d'exil fin mars avec l'intention de participer aux élections législatives du 11 mai, un test crucial pour la stabilisation de la démocratie dans le pays, en prônant un renforcement de l'armée pour rétablir l'ordre et la croissance dans le pays.
Mais un tribunal local a exclu cette semaine sa candidature en estimant qu'il avait plusieurs fois "violé la Constitution" lorsqu'il était au pouvoir. Pervez Musharraf ne semblait de toute façon selon les observateurs guère en mesure de peser sur le scrutin après avoir perdu nombre de ses soutiens depuis 2008.