"Il y a deux possibilités à cette appellation, indique Elisabeth Platel, directrice de l'Ecole de Danse, aujourd'hui installée à Nanterre. L'une est assez péjorative, l'autre un peu plus jolie".
"Dans le premier cas, elle évoque le surnom qu'on donnait à ces enfants malingres et affamés, issus de classes très défavorisées, et auxquels on donnait des miettes ou un quignon de pain +à ronger+".
"Dans le second, l'appellation se réfère au fait que les studios de répétition se trouvaient installés sous les combles, à l'Opéra Garnier et que le trottinement des élèves s'apparentait à celui de rongeurs dans un grenier".
Le roi Louis XIV, qui créa en 1713 cette "école française "fondée sur la primauté de l'harmonie, la coordination des mouvements, la justesse du placement et le dédain de la prouesse", aurait-il apprécié le sobriquet ?
Il est vrai que la plus ancienne école de danse au monde, réputée pour son perfectionnisme à l'égal des écoles russes du Bolchoï et du Marinsky, ou de l'école de danse du Danemark, a connu quelques vicissitudes au XIXe siècle.
A l'époque même où "La Sylphide" du chorégraphe Filippo Taglioni, inaugurait officiellement la technique des pointes en 1832, des rapports déploraient la misère des élèves, dont on signalait "la malnutrition et par conséquent, la propension à tomber précocement dans la débauche".
L'influence des Ballets Russes, au début du XXe siècle, puis l'arrivée du chorégraphe Serge Lifar et celle, plus tard, de Claude Bessy, danseuse-étoile et directrice de l'Ecole de 1972 à 2004, vont redonner à l'Ecole tout le lustre voulu par le Roi-Soleil.
Il n'empêche. Les "petits rats" restent les "petits rats", immortalisés en 1947 par une chanson restée célèbre. Même si, de l'avis du professeur de danse Bertrand Barena, "ce sont plutôt des félins que nous formons à l'Ecole".