Procès Chirac: la justice se donne près de trois mois de réflexion
AFP
Paris - La justice se donne un peu moins de trois mois de réflexion pour sceller le "destin" de Jacques Chirac: le tribunal correctionnel de Paris prononcera le 15 décembre son jugement dans le procès des emplois présumés fictifs de la ville de Paris.
Jacques Chirac
Depuis le 5 septembre, M. Chirac était jugé - avec neuf coprévenus - pour des faits remontant au début des années 1990, quand il était maire de Paris. Mardi, le parquet avait requis une relaxe générale.
Dispensé d'assister aux audiences pour raisons de santé, l'ex-chef de l'Etat doit répondre de "prise illégale d'intérêt", "abus de confiance" et "détournement de fonds publics" pour 28 emplois présumés fictifs, rémunérés par la mairie de Paris de 1990 à 1995.
"Pour la première fois peut-être, on juge un ancien président de la République. Votre responsabilité morale et politique est immense", a déclaré au tribunal Me Georges Kiejman, dernier des quatre avocats de M. Chirac à prendre la parole.
"Votre jugement sera la dernière image donnée de Jacques Chirac", a-t-il ajouté. "Vous transformerez la vie de Jacques Chirac en destin".
Après avoir retracé la carrière d'un homme qui "a occupé 50 ans dans notre univers politique", l'avocat a conclu: "vous ne pourrez pas rabaisser Jacques Chirac, qui a incarné la France pendant 12 ans, sans rabaisser la France".
"Si vous avez des doutes, laissez parler ces doutes!", a-t-il ajouté, demandant la relaxe.
"Vous êtes obligés de transcender ces misérables événements", a dit aux juges Me Kiejman, a propos des emplois litigieux reprochés à l'ex-chef de l'Etat.
Il s'est attaché à décrire ce qui constitue à ses yeux "l'essentiel: l'homme Chirac", "capable de faire de grandes choses".
"Petit comptable indélicat"
Me Kiejman a décrit "un homme profondément libre" qui s'est distingué de son propre parti en soutenant l'abolition de la peine de mort, la légalisation de l'avortement et le vote en faveur du traité de Maastricht.
Il a évoqué son opposition à la guerre d'Irak, évoquant une condamnation qui le résumerait, aux yeux de l'ex-président américain George W. Bush, à "un petit comptable indélicat, un escroc aux petits pieds".
Il a également évoqué Jacques Chirac comme l'homme du discours du Vel d'Hiv, qui a reconnu en 1995 la responsabilité de l'Etat français dans le génocide des Juifs".
"Que vous le vouliez ou non, on vous demande de juger l'ancien maire de Paris, mais celui que vous seriez tenté de condamner, c'est l'ancien président de la République, avec ce passé extrêmement glorieux que je viens de rappeler", a-t-il conclu.
Avant lui, Me Jean Veil avait lu la déclaration de trois pages que Jacques Chirac aurait dû prononcer lors du procès initialement programmé en mars, mais qui avait été renvoyé pour une question de procédure.
"Ce procès montrera que je n'ai rien fait qui soit contraire à la probité ou à l'honneur", assure M. Chirac dans ce texte. "Il n'y a eu ni enrichissement personnel, ni système".
"J'affirme n'avoir commis aucune faute, ni pénale, ni morale", dit-il.
L'ex-chef de l'Etat assure que "jamais les moyens de la municipalité n'ont été mis au service d'autres ambitions que celles d'agir pour les Parisiens".
Il maintient que le protocole d'indemnisation conclu avec la ville de Paris en septembre 2010 - qui a entraîné le retrait de la constitution de partie civile de la municipalité - n'est "en aucun cas une reconnaissance de culpabilité".