"Raoul" de James Thierrée : plongée au coeur d'une solitude onirique

AFP/Sophie LAUBIE

Danse, acrobatie, mime, théâtre, illusion: à la croisée des genres, "Raoul", le nouveau spectacle de James Thierrée, petit-fils de Charlie Chaplin, met en scène le voyage mental, poétique, d'un homme livré à la solitude.

De grandes voiles de tissu blanc tendues autour de la scène, gonflées par le vent ou éclairées par des halos de lumière, entourent une construction de tubes métalliques, dans laquelle un jeune homme s'agite et danse, se bat avec lui-même et avec les éléments.
Seul dans sa tour, il tente d'avancer, court sur place, tombe et se relève, se heurte au décor et aux objets qui l'entourent -une chaise, un tourne-disque, un violon, un tapis ou un miroir.
Cette création, présentée en première mondiale mardi au Théâtre de Namur en Belgique, est le quatrième spectacle, le premier seul en scène, de cet acteur et acrobate de 34 ans.
Fils de Jean-Baptiste Thierrée et Victoria Chaplin --créateurs des Cirques Bonjour, Imaginaire et Invisible--, James Thierrée a débuté dans le spectacle à quatre ans sous le chapiteau de ses parents.
Entre cirque et théâtre, révélant un univers féérique, ses précédentes créations, "La Symphonie du Hanneton", qui a reçu quatre Molières en 2006, "La Veillée des Abysses" et "Au revoir, parapluie", ont connu un retentissement mondial.
"Raoul" s'inscrit dans la même veine, mais sans les partenaires habituels de l'artiste - cantatrice, contorsionniste ou cascadeur.
Le spectacle mêle performances physiques, humour burlesque, gags sonores ou visuels, mime et aussi passages de danse, plus nombreux que dans ses précédents spectacles, avec une musique toujours très présente.
"Désir, rage, peurs, pirouettes, vertiges, murmures et barrissements se côtoient dans cette boîte que Raoul Pandore ouvrit dans un excès de curiosité", résume James Thierrée.
Son personnage évolue dans un rêve éveillé sans parole, sinon quelques marmonnements, borborygmes d'un homme se parlant à lui-même.
"Homme... Seul, barricadé, blessé, impalpable, insatiable", dit de lui James Thierrée.
"Raoul s'assiège lui-même. Il est à la fois l'attaquant et l'attaqué dans une tour. Il y a des créatures aussi qui l'entourent. Ce spectacle est une énigme, une épopée intime", explique l'artiste dans une interview à "La Libre Belgique".
Raoul cherche à comprendre une réalité qui lui échappe, se confronte aux objets et rencontre aussi des créatures étranges, animaux marins ou terrestres, méduse, poisson ou fossile d'oiseau, conçus par la mère de l'artiste, créatrice des costumes et accessoires.
Habituée à métamorphoser des objets du quotidien en animaux imaginaires, Victoria Chaplin conçoit ici des créatures artisanales inspirées du réel qui viennent rendre visite à Raoul et troubler sa solitude, mais l'ouvrir aussi aux autres et à lui-même.
L'artisanat, cher à James Thierrée, se retrouve aussi dans la conception des effets théâtraux, jeux d'ombre et fils que l'on tire, qui permettent à Raoul de s'élever et de tournoyer dans les airs.
Son personnage va aussi à la rencontre du public, que James Thierrée prend soin d'éclairer en rallumant par moments les lumières de la salle.
"Raoul, les doigts crispés sur la rive, n'attend qu'un signal...pour partir à la dérive", dit-il.
"Raoul" est à l'affiche au Théâtre de Namur jusqu'au 8 mai. Le spectacle sera présenté du 19 décembre au 5 janvier prochains à Paris, au Théâtre de la Ville.


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