Syrie: défection du Premier ministre, attentat contre la télévision d'Etat
AFP
Damas - Le Premier ministre syrien Riad Hijab a fait défection, a affirmé lundi l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), la télévision d'Etat assurant de son côté que M. Hijab avait été démis de ses fonctions.
Deux mois à peine après sa nomination, sur fond de révolte populaire devenue conflit armée, Riad Hijab, un sunnite, "a fait défection", a affirmé Rami Abdel Rahmane, chef de l'OSDH, sans toutefois pouvoir dire où se trouvait l'ex-Premier ministre.
Le Premier ministre syrien, Riad Hijab, a annoncé avoir rejoint l'opposition, a déclaré son porte-parole sur la télévision Al-Jazeera du Qatar.
M. Hijab a pris sa décision de faire défection en raison des "crimes de guerre et de génocide" en Syrie, a affirmé ce porte-parole Mohamed Otri, qui intervenait en direct d'Amman, affirmant que le Premier ministre syrien se trouve en "lieu sûr" avec sa famille.
La télévision officielle a, elle, annoncé qu'il avait été démis de ses fonctions et que Omar Ghalawanji, vice-Premier ministre et ministre de l'Administration locale, était désigné pour "expédier temporairement les affaires courantes".
Selon le quotidien gouvernemental Techrine, M. Hijab avait présidé dimanche deux réunions centrées "sur les mesures à prendre pour réaménager les régions purifiées des groupes terroristes armées", terme par lequel les autorités désignent opposants et rebelles.
Un nouveau général de l'armée syrienne est également arrivé lundi en Turquie pour rejoindre les troupes des combattants de l'opposition, accompagné de cinq officiers de haut rang et plus de 30 soldats
Dimanche, trois officiers des renseignements politiques à Damas, dont deux frères issus du clan du vice-président sunnite Farouk al-Chareh, ont fait défection et trouvé refuge en Jordanie, a assuré à l'AFP le colonel Kassem Saad Eddine, porte-parole de l'Armée syrienne libre (rebelles) en Syrie.
Par ailleurs, le premier cosmonaute syrien, le général Mohammad Ahmad Fares, 61 ans, s'est, lui, réfugié en Turquie, selon l'agence Anatolie.
L'annonce de la défection de Riad Hijab est intervenue quelques heures après un attentat au siège de la radio-télévision d'Etat qui n'a fait que des blessés légers et n'a pas perturbé la poursuite des programmes.
Portée symbolique
Pour autant, cette attaque a eu une forte portée symbolique puisqu'elle a visé le principal outil d'information du régime, de surcroît dans un quartier ultra-protégé de la capitale. Pour pénétrer dans l'immeuble, il faut se prêter à plusieurs contrôles des services de sécurité.
Cet attentat est intervenu alors que l'armée a affirmé il y a deux jours contrôler totalement la capitale après avoir repris le quartier de Tadamoun.
La chaîne officielle d'information en continu al-Ikhbaria a montré le ministre de l'Information inspectant le troisième étage au milieu de murs éventrés, de chaises renversées, de fils électriques pendant du plafond, de canalisations d'eau rompues, et alors que des secouristes évacuaient un blessé.
Samedi déjà, les rebelles avaient attaqué sans succès le bâtiment de la télévision d'Etat à Alep (nord), et le même jour, l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) confirmait qu'un présentateur de la même chaîne, Mohammad al-Saïd enlevé à la mi-juillet à son domicile à Damas, avait été exécuté.
Alors que de plus en plus de déserteurs et de civils prennent les armes face à la répression sanglante du régime, Bassma Kodmani, une des porte-parole du Conseil national syrien (CNS), principale coalition de l'opposition, a affirmé que le Qatar, l'Arabie saoudite et la Libye fournissaient des armes aux rebelles.
A Alep, poumon économique du pays, des bombardements et des tirs d'arme automatique avaient lieu lundi dans plusieurs quartiers, causant la mort de huit civils et d'un commandant rebelle, selon l'OSDH.
Depuis le début de la journée, 28 personnes ont été tuées à travers la Syrie, dont 21 civils et huit rebelles, selon l'organisation basée à Londres qui tire ses informations et ses bilans d'un réseau de militants et de témoins en Syrie.
Dimanche, 131 personnes ont péri, dont 79 civils, 42 soldats et 10 rebelles, selon l'OSDH. Compte tenu des restrictions imposées par les autorités, il est impossible de vérifier ces bilans de source indépendante.
"Massacre" à Hama
Par ailleurs, le CNS a accusé les forces fidèles à Bachar al-Assad d'avoir "massacré" une quarantaine d'habitants dans la province de Hama (centre).
Selon le CNS, ce massacre commis à Harbnafsa, 8.000 habitants, dans une province sunnite "s'inscrit dans le cadre d'un exode confessionnel" forcé.
Le CNS précise que les troupes ont d'abord pilonné la localité à l'aide de chars pendant plus de cinq heures, avant de la prendre d'assaut, faisant une quarantaine de morts et quelque 120 blessés, en majorité grièvement touchés.
Toutefois, l'OSDH a de son côté fait état de 11 civils tués, dont cinq enfants.
En vue de la bataille d'Alep qu'elle juge "décisive", l'armée a achevé dimanche l'envoi d'importants renforts dans cette deuxième ville du pays, théâtre d'affrontements depuis le 20 juillet.
Selon un responsable de la sécurité, au moins 20.000 militaires ont été déployés sur le front d'Alep, où les rebelles comptent pour leur part entre 6.000 et 8.000 hommes, d'après le journal al-Watan, proche du pouvoir.
Les rebelles disent tenir la moitié de la ville et affirment que, malgré les bombardements, par l'artillerie et l'aviation, les soldats ne parviennent pas à avancer au sol.