Turquie: nouveaux heurts à Ankara entre police et manifestants

AFP

Ankara - Les heurts entre policiers et contestataires se sont poursuivis à Ankara dimanche, au lendemain de l'intervention musclée des forces de l'ordre turques, condamnée par le Conseil de l'Europe, contre les manifestations qui ont marqué le premier anniversaire des rassemblements antigouvernementaux de juin 2013.

La police a, pour la deuxième journée consécutive, tiré du gaz lacrymogène et utilisé des canons à eau, afin de disperser quelque 500 personnes place Kizilay, dans le centre de la capitale, à l'endroit même où, l'année dernière, un manifestant de 26 ans avait été tué par balle, a constaté un photographe de l'AFP.

Ethem Sarisuluk, dont la famille a déposé des fleurs sur le site du drame, avait perdu la vie dans les violences survenues il y a un an quand quelque 3,5 millions de Turcs - chiffre officiel - avaient protesté dans la rue pendant trois semaines contre le chef du gouvernement islamo-conservateur Recep Tayyip Erdogan. Ces manifestations durement réprimées dans toute la Turquie avaient au total fait huit morts et plus de 8.000 blessés

"Le meurtrier d'Ethem, c'est la police de l'AKP !", le Parti de la justice et du développement, au pouvoir, ont scandé les contestataires dimanche à Ankara.

"Ce n'est qu'un début, le combat continue !", ont-ils encore crié.

- Condamnation du Conseil de l'Europe -

Le Conseil de l'Europe a vivement déploré dimanche la manière dont les policiers s'étaient comportés la veille contre les milliers de manifestants.

"Je condamne l'usage excessif de la force par la police turque contre les manifestants et les journalistes", a en effet déclaré Nils Muiznieks, commissaire aux droits de l'Homme du Conseil de l'Europe, dans un communiqué transmis à l'AFP.

Les événements de samedi "viennent s'ajouter à la liste de cas où la gestion de manifestations en Turquie soulève de graves inquiétudes en matière de droits de l'Homme", a-t-il ajouté.

La semaine dernière, deux personnes ont été tuées dans une banlieue d'Istanbul au cours de heurts entre les forces de l'ordre et des manifestants qui honoraient la mémoire d'un adolescent mort des suites des blessures lui ayant été infligées pendant la fronde de 2013.

"Les dérapages des personnes chargées de faire respecter la loi représentent une menace directe à l'Etat de droit et ne peuvent être tolérés", a encore dit M. Muiznieks, appelant instamment les autorités turques à traiter les contestataires conformément aux normes en matière de droits de l'Homme.

Samedi, le Premier ministre avait mis sa menace à exécution et la police était massivement intervenue dans la soirée à Istanbul et Ankara avec force gaz lacrymogène et canons à eau contre tous ceux qui avaient bravé l'interdiction de manifester aux cris de "Taksim partout, résistance partout !", ou "Tous ensemble contre le fascisme !".

D'impressionnantes cohortes de policiers en civil armés de matraques avaient alors chargé dans les rues d'Istanbul qui mènent à la fameuse place Taksim, le cœur de la révolte du printemps 2013, procédant à de nombreuses arrestations et faisant plusieurs blessés.

Rien que dans cette agglomération, survolée par des hélicoptères, les autorités avaient mobilisé 25.000 hommes, des dizaines de blindés et 50 canons à eau.

Des photographes ont saisi des scènes de violence place Taksim, où des manifestants ont été matraqués et d'autres allongés par terre, certains perdant du sang, après avoir respiré du gaz lacrymogène.

Des heurts sporadiques s'étaient poursuivis toute la nuit en différents quartiers des deux premières villes de Turquie.


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