Véronique Courjault condamnée à huit ans de prison
Reuters
Véronique Courjault a été condamnée jeudi à huit ans de prison pour avoir tué à leur naissance trois de ses enfants entre 1999 et 2003, conservant deux corps au congélateur.
Henri Leclerc avait auparavant déclaré en marge du procès que la question d'un éventuel appel se poserait au-delà d'une peine de dix ans de prison.
La cour d'assises d'Indre-et-Loire a reconnu la préméditation pour le meurtre des deux enfants dont le corps a été retrouvé au congélateur, à Séoul, en Corée du Sud.
Jugée pour "assassinats", l'accusée encourait la réclusion à perpétuité. L'accusation avait demandé une peine de dix ans de prison, prenant en compte des circonstances atténuantes.
La défense avait suggéré une peine de prison avec sursis total ou partiel assortie d'une obligation de suivi psychologique.
Jean-Louis Courjault, le mari de l'accusée qui s'était porté partie civile pour la soutenir, a dit son soulagement.
"Dans quelques mois, Véronique pourra revenir chez nous. Je viens de l'annoncer à mes enfants", a-t-il déclaré à la presse.
"Il y a eu des sourires. Il y a de la joie à la maison", a-t-il ajouté.
Interrogé sur une éventuelle libération anticipée de Véronique Courjault, l'avocat de son mari, Me Marc Morin, a estimé qu'"une détenue qui lit Shakespeare en anglais en prison ne pose pas de problème" de discipline.
L'affaire avait éclaté en 2006 lorsque le mari de Véronique Courjault, âgée aujourd'hui de 41 ans, avait découvert fortuitement les corps de deux nouveau-nés dans le congélateur du domicile familial, à Séoul.
Mis en cause par les policiers durant l'enquête pour la froideur de ses explications, Véronique Courjault, déjà en prison depuis octobre 2006, a assuré à la fin de son procès qu'elle avait pris conscience d'avoir commis un crime.
"Je voudrais dire que j'ai essayé d'expliquer comme je l'ai pu. Je suis consciente d'avoir tué mes enfants et ça me restera tout le temps", a-t-elle dit, en larmes, dans ses derniers mots à la cour.
LES EXPERTS PARTAGÉS
Les experts psychologiques et psychiatriques sont partagés sur l'explication des mobiles du crime.
Certains pensent que l'accusée a agi sous l'emprise d'un phénomène psychologique relativement courant appelé "déni de grossesse", par lequel certaines femmes refusent inconsciemment d'être enceintes, mais la plupart l'écartent.
Ils estiment en général que l'accusée, déjà mère à son premier crime de deux garçons âgés aujourd'hui de 12 et 14 ans, a plutôt agi par refus conscient d'être à nouveau mère.
La défense a plaidé dans la matinée la clémence en soulignant que son mari et ses deux enfants la soutenaient à l'audience et attendaient son retour.
"Je vous le demande, votre condamnation doit être porteuse non de désespoir, mais d'espoir", a dit Henri Leclerc aux jurés.
Soulignant que les experts ne concluaient pas avec certitude à une éventuelle affection psychologique, il a suggéré une peine de cinq années de prison avec sursis et une mise à l'épreuve, avec un suivi psychologique obligatoire.
Mercredi, l'avocat général Philippe Varin avait demandé à la cour de retenir le scénario de crimes commis en toute conscience, mais il a accepté les circonstances atténuantes en raison des problèmes psychologiques de l'accusée.
"Ce sont des faits d'une extraordinaire gravité. Ne diabolisez pas Véronique Courjault, mais n'en faites pas une icône", a-t-il dit.
Plusieurs autres cas de congélation de nouveau-nés tués ont été révélés en France depuis 2006. Une peine de huit ans de prison a été prononcée le 12 juin en Bretagne contre une femme jugée dans un dossier similaire.
Véronique Courjault a reconnu avoir étranglé à leur naissance trois enfants mis au monde en secret, l'un en France en 1999, deux en Corée du Sud en 2002 et 2003.
Elle a révélé aux policiers avoir incendié dans la cheminée de son domicile français, pendant que son mari et ses enfants dormaient, le corps du premier enfant qu'elle a tué en 1999.
Jean-Louis Courjault, un temps mis en examen pour complicité d'assassinats, a bénéficié d'un non-lieu à la fin de l'enquête, qui a établi qu'il n'avait rien su.